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Ensilage d’herbe 2021 Exception faite des rares fauches très précoces, la qualité laisse à désirer

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Si l’année 2021 a été propice aux rendements et à la reconstitution des stocks fourragers, elle ne l’a pas franchement été pour la qualité des ensilages d’herbe…

Par exemple en Normandie, où l’ensemble des analyses sur les ensilages récoltés montre une baisse par rapport à 2020 de l’ordre de 1 point de MAT, à 13 %.

Olivier Leray, conseiller fourrages à Littoral Normand, l’attribue au printemps froid et humide, qui a joué sur la minéralisation de l’azote du sol. Il note aussi une moindre digestibilité de la matière organique, à 70,8 %, contre 72,2 % en 2020. Pour autant, la valeur énergétique reste correcte, à 0,92 UFL dans le système des nouvelles normes Inra 2018 (système Systali), qui a tendance à booster cette valeur (+ 0,06 par rapport à Inra 2007).

Des fauches très précoces de top qualité dans l’Est

De façon plus détaillée, dans le quart nord-est (sur la zone Seenorest), on observe sans surprise des qualités très hétérogènes selon les dates de fauche.

Ceux, rares, qui ont osé sortir la faucheuse à la première fenêtre de tir, le 28 avril, ont certes rentré peu de fourrages (rendement de 1 à 1,5 tMS/ha) mais d’une qualité optimale. De fait, ces ensilages ont été réalisés au tout début du printemps dans des conditions idéales – avant que celles-ci ne se dégradent et que la pluie ne s’installe. On y relève, sur des prairies naturelles­, des valeurs de 17,8 % de MAT et 1,02 UFL (Inra 2018), fruit d’une excellente digestibilité de la matière organique, à 77 %, et de fibres très fermentescibles (430 de NDF).

On retrouve la même qualité au top sur les toutes premières coupes d’ensilages de prairies naturelles effectuées à la même période en Meuse, analysées par le service technique de l’ULM. À 78 de dMO, 433 de NDF et 1,02 UFL, ces ensilages rivalisent avec ceux des prairies temporaires à base de ray-grass analysés. Mais ils les surclassent clairement sur la MAT, à 18 % contre 12,5 %… La preuve que des prairies permanentes soignées comme il se doit et récoltées tôt sont une vraie richesse.

Les éleveurs qui, dans le Nord-Est, n’ont fauché qu’à la deuxième­ fenêtre de tir, début mai, et ceux, bien plus nombreux encore, à ne réaliser leurs premières coupes que fin mai-début juin, dans des conditions météo assez aléatoires, n’ont pas la même qualité de fourrages en stock, tant s’en faut. Les jours passant, on a vu en toute logique la digestibilité des fibres, le niveau UFL et MAT se dégrader rapidement. « Ce qui rappelle une fois de plus l’intérêt de faucher le plus tôt possible, afin d’assurer la qualité et potentiellement économiser sur la complémentation azotée à acheter », note Jérôme Larcelet­, nutritionniste Seenorest.

Ceux qui, dans le Nord-Est, ont fauché le plus tard possible, soit fin mai, ont certes assuré le rendement mais ont en silo un fourrage plus fibreux et moins digestible (520 de NDF et 70 de dMO), titrant seulement 11 % de MAT et 0,88 UFL.

Un duo « ensilage très précoce-maïs » idéal, mais trop rare

« Ces ensilages très précoces devraient s’avérer assez complémentaires des maïs 2021 au vu des premières analyses en vert réalisées, observe Jérôme Larcelet. On aurait en effet des maïs plutôt riches en cellulose (20 à 22 %), moyennement digestibles (70 à 71 de dMO) avec un taux d’amidon correct de 28 à 30 %, peu acidogène, donc. » L’idéal, sur le papier, avec cet ensilage très digestible, riche en énergie et azote soluble, auquel il faudra ajouter de la fibre afin de ralentir le transit.

En revanche, pour booster la digestibilité faible de la majorité des ensilages de fin mai, le nutritionniste conseille « d’apporter de l’énergie fermentescible de type blé ou orge. Mais aussi de l’azote soluble. Aux prix actuels des complémentaires azotés, jouer sur des apports d’urée peut être une option. On pourra aussi, pour doper la flore microbienne du rumen, miser sur des apports de levures ».

Auvergne : ensilages précoces décevants

En Auvergne, les premières coupes en plaine et demi-montagne (moins de 800 m) ont clairement pâti des gelées importantes enregistrées. Pour Jean Zapata, conseiller fourrages à l’EDE du Puy-de-Dôme, elles expliquent la MAT décevante, à 13,2 %, de ces prairies pourtant fauchées en tout début d’épiaison. Les premières analyses sur silos les donnent moyennement digestibles, à 64 de dMO, 520 de NDF et 0,88 UFL. On retrouve d’ailleurs là des valeurs équivalentes sur les secondes coupes. Sur la montagne (plus de 800 m), le conseiller, qui manque de retours d’analyses, ne s’attend pas à des miracles. « Le mauvais temps a retardé la fauche d’un mois, au 10-15 juin. Avec une fauche au stade pleine épiaison, je crains 11 % de MAT. On était à 14 % en 2020. »

Vigilance quant aux risques butyriques

Fort des analyses de la zone 3CE (Haute-Marne, Moselle et Alsace), Julien Homand, de la chambre de Haute-Marne, souligne le faible taux de MS : - 7,7 points, à 33,3 % de moyenne par rapport à 2020. Attention, donc, aux risques butyriques, que confirment des alertes issues du terrain­. Qui dit faible taux de MS, dit protéolyse plus importante au silo et un ensilage riche en azote soluble. Le nutritionniste conseille aux éleveurs dans ce cas, qui associeront au maïs cet ensilage d’herbe, « d’apporter des sources d’énergie fermentescibles afin de valoriser au mieux l’azote soluble disponible. Mais aussi des sources d’azote protégées ». Car avec ce type d’ensilage pas assez préfané, la quantité d’azote est suffisante pour nourrir la flore du rumen, mais pas la vache.

Jean-Michel Vocoret

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